Le temps des leçons est terminé
TAMPA – Ne pas céder de terrain pendant 40 minutes à la meilleure équipe de la Ligue nationale, l’une des plus dominantes des deux dernières décennies, qu’est-ce que ça vaut? Une victoire morale? Une leçon à tirer?
C’est peut-être ce qui aurait défrayé la chronique l’année dernière si le Canadien avait si bien tenu son bout au cours des deux premières périodes avant de s’écrouler contre la machine offensive bien huilée du Lightning de Tampa Bay (44-11-4).
Plus maintenant. Le temps des petites victoires et des prix de consolation est révolu dans le vestiaire montréalais.
Et c’est Carey Price qui le dit.
Brendan Gallagher a parlé de leçon après la défaite. Le gardien ne l’entendait pas de cette oreille.
« Je ne sais pas si c’est parce que je suis un vétéran dans cette ligue, mais ces leçons devraient déjà être apprises. On devrait savoir qu’il faut élever notre jeu d’un cran à ce moment-là », a lancé Price, plutôt en verve et franchement mécontent.
Il y a cette assertion qui circule selon laquelle le Canadien est une jeune équipe. C’est faux.
Le noyau de son attaque l’est. Les Max Domi, Jonathan Drouin, Jesperi Kotkaniemi et autres le sont. Et ils trahissent leur âge tendre par une certaine immaturité par moments.
Mais avec Nate Thompson et Dale Weise dans la formation, le club a une moyenne de 27,4 ans, au milieu du peloton de la LNH.
Drouin et Domi souffleront seulement 24 bougies le mois prochain, certes, mais ils comptent déjà tout près de 300 matchs d’expérience (299 pour le premier, 280 pour le second) dans le circuit Bettman.
Visiblement, Price, qui a été spectaculaire pour repousser 34 rondelles, avait de la difficulté à digérer le manque d’implication de ses coéquipiers au dernier tiers.
Une bouée lui était lancée par les journalistes de temps à autre. Il les évitait toutes soigneusement.
Est-ce que le but refusé à Brett Kulak a coupé votre élan?
« Le deuxième entracte a été le point tournant », a laissé tomber le joueur étoile, faisant référence à l’ineptie de sa bande à l’entame du troisième vingt.
L’avantage numérique du Lightning vous a fait mal?
« Même avant [le premier but en supériorité], ils avaient levé leur jeu d’un cran. Pas nous. On n’a pas égalé leur effort », a-t-il jugé.
« On s’est complètement écrasés en troisième période. C’est un résultat frustrant assurément, parce qu’on a bien joué pendant 40 minutes. Pendant 20 minutes, on ne s’est pas présentés », a-t-il déclaré.
Des erreurs coûteuses
Ce parfum qui se dégageait après la rencontre, c’était de l’amertume.
Price ne s’est pas voilé le visage, d’accord, mais sa bande a servi quelques excuses.
Si notre but n’est pas refusé à cause d’un hors-jeu, ça aurait pu changer le rythme du match. Si ça compte, on reprend notre élan.
« En troisième, on a craqué à 0-0. On avait joué deux bonnes périodes. On a manqué des chances de marquer, on a marqué un but qui a été refusé, comme de raison. La punition (à Phillip Danault) était peut-être un peu faible. Ce n’était pas grand-chose. Ça nous a coûté un but », a résumé Julien.
L’arbitrage, donc, et le manque de pot, diraient les Français.
On sentait surtout l’équipe blessée de quitter Tampa sur un résultat sec, sans appel, déçue de n’avoir amassé aucun point en deux matchs depuis le début du voyage avec un autre duel à disputer à peine 24 heures plus tard avant de revenir à Montréal.
Incapable d’embrayer en cinquième vitesse quand le Lightning a accéléré, elle s’est trouvée face à son impuissance.
Phillip Danault a reçu une punition pour accrochage et Nikita Kucherov, qui d’autre, a donné l’avance au Lightning, et le château de cartes s’est écroulé.
Deux présences plus tard, Max Domi a raté une sortie de zone en raison de la pugnacité de Mathieu Joseph, et Price a dû se signaler devant Victor Hedman. À la reprise du jeu, Drouin a tenté une passe transversale en zone neutre, interceptée, qui a mené au but de Yanni Gourde.
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En l’espace de 85 secondes, les jeux étaient faits.
Parlant de Drouin, Robert Louis Stevenson aurait sûrement convenu qu’on a eu droit à la version Monsieur Hyde du patineur de Sainte-Agathe.
Avant le match, Drouin a semblé déterminé à régler ses comptes avec son ancienne équipe. Dieu du ciel. La facture est encore salée.
Julien n’a pas manqué de le souligner, d’ailleurs, lui qui a plutôt tendance à protéger son jeune talent lorsqu’il s’empêtre.
« Sur le deuxième but contre, c’est Jonathan quand il force des jeux et qu’il ne patine pas. Il a fait la même chose à Nashville. Même chose ce soir. Ce sont des choses qu’il doit corriger. Ça nous a coûté [le] deuxième but », s’est agacé l’entraîneur.
Julien a aussi laissé entendre qu’il n’était pas en accord avec deux des quatre punitions du Tricolore.
Montréal n’est pas la première équipe à constater les ravages de cette puissance de la ligue. Pas la dernière non plus.
L’abattement des joueurs nous prouve qu’ils croient sincèrement pouvoir rivaliser avec elle.
C’est la bonne nouvelle. La mauvaise? Les Hurricanes n’ont plus qu’un point de retard au classement. Les Penguins, deux.
En rafale
Nikita Kucherov a ajouté deux points à son impressionnante récolte et en totalise 94 cette saison. S’il maintient cette cadence infernale, il deviendra le premier homme à fracasser la barre des 130 points en une campagne depuis le tandem de Mario Lemieux (161) et de Jaromir Jagr (149) en 1995-1996.
Le gardien partant du Lightning, Andrei Vasilevskiy, a réussi un deuxième jeu blanc d’affilée, son sixième cette année, et rejoint du même coup Marc-André Fleury au 1er rang à ce chapitre.
Le Canadien s’est fait dévorer en termes de possession de rondelle. Seul Jesperi Kotkaniemi a maintenu un taux favorable à cinq contre cinq, tandis que le quatrième trio a été particulièrement dominé avec un indice Corsi de 11,11 %. Au cours de la troisième période, selon votre indice de possession favori, le Lightning a eu la rondelle de 70 à 80 % du temps. Ce n’est pas idéal.
Montréal conclut son segment de quatre matchs contre des puissances de la ligue avec trois points (1-2-1).